La plaine glacée

Derrière lui, il pouvait facilement entendre le bruit du vol des corbeaux qui le suivait. Étaient-ils là attendant seulement que ce mort se décompose pour finalement le dévorer? Sans doute ces oiseaux de malheur trépasseraient avant lui; il dégagait un sentiment de mort, ils le sentaient, mais ne mourrait pas, jamais.
Devant lui, un grande plaine givrée se déployait. Les plantes semblaient prises dans les griffes du temps, le verglas les ayant totalement recouvert de glace, donnant à l'endroit un aura de calme. Un vent tout aussi calme règnait sur la place, déplaçant un peu de neige poudreuse à chaque souffle, recouvrant le paysage de petite vagues de neiges.
L'air lui semblait froide, mais sa peau ne ressentait rien; il ne faisait confiance qu'au givre de son équipement métalique ainsi qu'à la mince glace qui se formait sur ses joues immobiles.
Il continua sa route dans la plaine quasi déserte pour finalement atteindre un épitaphe de très grande taille où il ne jeta qu'un seul regard en disant:
" Ton corps est prisonnier de la mort, de la terre, mais ton âme est libre. Mon âme, elle, est prisonnière de ce corps mort et sans vie. "
Puis, comme s'il attendait une réponse, un faible son distinctif vint résonner à son oreille débarrasser de tout bruit de battement de coeur...

Dans la grande plaine glacée bordant son pays natal, Roth’gar cheminait en silence, le regard au loin. Son esprit était complètement ailleurs; il réfléchissait aux dernières années de sa vie. L’apprentissage auprès de l’abbé, son Test définitif... et son emprisonnement. Ce souvenir le fit frissonner; il revint à la dure réalité. Heureusement que le vent mordant sa chair ne le faisait aucunement souffrir.
Ses pas le menèrent près d’un épitaphe. Les inscriptions indiquées sur celui-ci ne lui disait vraiment rien. Soudain, le son d’une voix empreinte d’une certaine éducation se fit entendre. Portant son attention sur l’endroit où la voix s’était faite entendre, Roth’gar vit un étrange personnage. Répugnant d’utilisé sa voix, il choisit plutôt d’attirer son attention en effectuant un léger bruit. L’étranger se retourna vers lui. Roth’gar l’observa de haut, un rictus de dégoût décorant ses lèvres.
-Mais qu’es-ce que cette horreur? Se dit-il pour lui même.

Nathaniel, remarquant l'homme à ce qu'il devait être, un érudit, ne fit que se tourner pour lui faire face. À ce moment, il avait aucunement l'envi de parler, ni même d'être vu; il voulait être seul, mais au même moment, il ne voulait pas l'être.
" Rentrez chez vous, le froid vous aura à son tour. Le village le plus près se trouve dans cette direction, à environ trois quarts d'heure de marche. " Déclara-t-il, pointant le sud-ouest de sa main armée.
Il se retourna de nouveau pour s'agenouiller devant l'épitaphe lorsqu'il sentit, un regard froid lui pénétrer le dos, comme si sa peau elle même frissonait sous un simple regard.
Par-dessus son épaule il jeta un regard derrière lui, son expression marquant de ses traits une certaine intrigue.

La signification des paroles de l’étranger créa un rictus amusé sur sa bouche, lui faisant totalement oublier son apparence. Il croyait vraiment qu’il allait geler sur place? Quelle bonne blague... Au moment où il se retourna, Roth’gar le fixa intensément. Son regard terrible refroidissait toujours ceux qu’il regardait. Il savait que ce phénomène étrange allait attirer l’attention de l’homme. Résigné à parler le premier, le mage souleva sa capuche avec douceur. Ainsi, l’étrange personnage pourrait voir que le vent septentrional ne lui causait aucune douleur.
-Vous cheminez dans les méandres de vos pensés. Tout comme mon humble esprit semble le faire. Vous avez donc des problèmes qui pèsent sur votre conscience ou aurais-je tort? Déclara, d'une voix clair, Roth'gar.

Ces mots résonnaient comme des propos vitrioliques aux oreilles de Nathaniel. Un simple humain, si vivant, plein de vivacité, mais si froid...
" Vous ne savez rien de ce que je vis, mortel! " Rugit Nathaniel avec férocité, faisait désormais face à son interlocuteur.
Il fit quelques pas pesés en direction de l'homme, le regard furieux et étouffant.
" Qui croyez-vous être pour vous immiscer ainsi dans la vie des autres? Si vous osez bourder en ce lieu qui m'est sacré, ce sera votre sang que le froid transira avant tout autre chose. " Prononça-t-il, le regard brûlant.
Le vent froid balayait la plaine avec plus de vigueur maintenant; les cheveux et la cape de Nathaniel ballottaient à un rythme inconstant.
Le mort se tenait là, immobile, attendant une réponse franche au prix de sa vie.

Ces paroles prononcées avec autant de vigueur ne surpris nullement Roth’gar; il se doutait bien que cet être était rempli de rancune et de colère. Le vent mugissant à ses oreilles, le mage déclara d’une voix plus douce et empreinte de pitié:
-Pardonnez-moi, mon cher, je ne faisais qu’exprimer ce que je voyais. De plus, je ne cherche absolument pas une confrontation, mais le savoir. Et le proverbe le plus connu affirme bien que c’est en observant que l’on apprend.
Relevant son menton, il regarda la réaction de l'homme en souhaitant que ses paroles aient eu pour but de calmer les ardeurs de cet étrange homme.

" Du savoir? " Demanda Nathaniel avec mépris?
" Vous me confondez avec une bête de cirque, ou est-ce ma tête qui se confond avec votre propre idiotie? " Rugit-il, ses yeux s'illuminant l'instant d'une seconde.
En quelques pas lourds de colère, Nathaniel s'approcha avec arrogance de l'homme frigide, son visage à une piètre distance de celui de son interlocuteur.
" Du savoir? " , répéta-t-il, détachant sauvagement le pensement à son bras droit pour le laisser voler plus loin, vers l'ouest, " C'est ça que vous désirez comprendre, n'est-ce pas? "
Il affichait désormais sa blessure entre lui et le jeune homme au regard si froid, l'entaille toujours aussi fraîche et dépourvue de sang.

Roth’gar fut tout simplement abasourdi. Il avait vu des choses exceptionnelles dans sa vie, mais jamais à ce point. Mais sa soif de connaissance pris le dessus sur sa peur. Comment cet homme fait d’os et de chair ne pouvait pas saigner? Ignorant la colère de cet étrange personnage, il se concentra pour lancer un sort de détection. Puisant au fond de lui la magie nécessaire, le mage ferma les yeux et, sans une incantation lisible sur ses lèvres, il lança le sortilège. À sa grande surprise, il ne détecta rien... absolument rien. N’y comprenant rien pour le moment, Roth’gar choisit de poursuivre la conversation.
-Mais qui y a-t-il à comprendre d’un phénomène surnaturel, n’ayant pas sa place dans l’univers? Que puis-je supposer comprendre d’un être d’os et de chair qui ne vie point?

En toute arrogance, Nathaniel posa son index enfermé derrière sa griffe de fer sur ses lèvres, comme s'il se questionnait l'espèce d'un instant.
" Que devez-vous y comprendre? " Souffla-t-il autant pour lui même que l'homme devant lui?
"Cela!" Rugit-il à nouveau, ses yeux brillants de mille feux, sa main organique agrippant sèchement la frêle homme.
Il le projetta avec toute sa fureur à au moins cinq mètres avant de bondir sur sa proie, sa main de fer prête à lui lacérer le visage et à lui perforer les joues...
Soudain son regard sembla reprendre une allure normale qui il réalisait ses actions. Il aida l'homme à se relever.
" Veuillez me pardonnez, monsieur, vous n'auriez pas dut voir cela. " Termina Nathaniel, la main sur sa blessure.

Les os de son corps le faisait terriblement souffrir; son corps n’était pas fait pour les combats physiques. N’ayant subi aucune blessure interne, il commença à se questionner afin de savoir la raison de la colère de cet étranger. Roth’gar en vint rapidement à la conclusion que ce n’était nullement sa faute. Une situation ultérieure lui avait probablement laissée un goût amère dans la bouche et l’homme cherchait seulement à évacuer toute sa colère sur quelque’un.
L’homme à la main de fer l’aida à se relever. Le mage apprécia grandement ce marque de bonté. Mais il trouvait que son éloignement envers les autres étaient parfaitement justifiable. Les paroles qui sortirent de la bouche de l’étranger lui confirma son hypothèse; cette colère ne lui était pas destinée.
-Vos excuses sont acceptés, dit Roth’gar en le regardant de haut afin de lui prouver sa supériorité. Cette rencontre a bien mal débuté, laissez-moi arranger les choses. Je me nomme Roth’gar, mage de profession.

Nathaniel comprit que s'était sa douleur refoulée qui l'avait poussée à démontrer une facette de sa véritable nature; il ne devait pas en parler plus. Le silence soudaine prit une allure démesurée. Comme il ne savait pas s'il pouvait faire confiance à l'homme, il décida tout de même de se présenter afin d'éviter quelconque affrontement:
" Quant à moi, je suis Nathaniel de Maupassant, noble propriétaire de cette terre. Qui voudrait d'une telle terre, dites-vous? En toute sincérité, je la garde en hommage à ma défunte femme. C'est ce qu'elle aurait toujours voulu, un paysage blanc aux mille et un crystaux; cette terre, par contre, est devenue sa tombe. " Introduit-il, solonellement.
Il se mit en route vers le sud-ouest, puis se retourna vers Roth'gar qui ne s'était pas mouvé.
" Que diriez-vous de reprendre cette discussion avec une bonne coupe de Côte-de-Vaast rouge? On dit que les rencontres les plus ratées sont celles qui finissent les mieux! " Renchéri Nathaniel d'une voix souple et éveillée.

Le mage découvrit quel malheur avait subi Nathaniel; perdre sa femme devait en effet changer un homme. Il en fut affligé pour lui. Finalement, les deux possédaient une quelconque ressemblance; lui avec l’abandon infligé par ses parents et l’autre avec la mort de sa femme. Les deux avaient nécessairement beaucoup souffert. Voulant en apprendre plus au sujet de ce Nathaniel, Roth’gar lui répondit:
-Je vous suis volontiers, mon cher. Rien de mieux qu’une coupe de vin pour discuter. Allons y sans tardé.
Roth’gar fut surpris de son attitude; habituellement, il essayait de fuir autrui. Mais l’étrange ressemblance qui le liait à l’autre l’incitait à le suivre. De plus, cet être semblait possédé de vaste connaissance, puisqu’il avait bravé la mort...

" Que diriez-vous d'aller faire un tour à La flûte aux gnomes, une petite auberge vers le sud-ouest. " Pointa-il.
Soudain lui revint en mémoire l'échange qu'il avait eu avec les deux elfes, peut-être ne serait-il pas encore bien accueillit. Il chassa ses idées noires et ajouta:
" Nous n'y serons peut-être pas bien traité, mais l'alcool y est bonne, c'est tout ce qui importe. Après tout, une petite escarmouche ne fait qu'ajouter un peu de plaisir à la chose. "
Il leva alors le pied dans la direction de la taverne, les corbeaux suivant alors ses pas à la trace.

Observant l’auberge, il écouta attentivement les paroles de Nathaniel. Il ne comprenait pas vraiment pourquoi ils y seraient pas bien accueilli, mais l’idée d’utiliser ses pouvoirs le réjouissaient. Il répondit à l’homme:
-Aucun problème, pourvut que l’alcool en vaut la peine.
Roth’gar suivit Nathaniel dans l’auberge, oubliant la présence des corbeaux. L’ambiance de l’établissement le surprit. De nombreuses personnes de différentes races conversaient à voix hautes tout en écoutant des bardes elfes. Le mage s’attendait plutôt à une ambiance relaxante afin de converser avec Nathaniel. Pour éviter les regards, il rabattit sa capuche et garda le silence tout en suivant les pas de son compagnon.

Nathaniel se retourna afin de confirmer la présence de Roth'gar. Il hésita un instant puis, la longue distance qui séparait l'épitaphe de l'auberge parcourrue, franchit le seuil de la porte.
De l'autre côté, il déclara:
" Allez, entre. "

(direction: La flûte de aux gnomes)

Habile malgré l'absence de vie derrière ses muscles, Nathaniel escalada avec aise un arbre qui flancait l'auberge "La flûte aux gnomes". L'air y était plus fraîche selon le visage de son gantelet, car sa face supérieur se couvrait déjà de crystaux d'eau glacée; le vent, lui aussi, y était plus féroce.
Le vent, les odeurs et les nuages de charbon provenaient du nord-ouest. L'air elle-même était confuse; les corbeaux disparaissaient peu à peu, le vent rugissait avec agressivité, le ciel se couvrait d'un noir épais, les pans des fenêtres de l'auberge se balaçaient incontrôlablement.
Toute cette perturbation venait du nord-ouest.
" Du nord-ouest? " Souffla Nathaniel autant pour lui et Éria que pour quelconque principe divin qui lui prêtait l'oreille à cet instant s'il y en avait un.
Ses yeux rugirent d'une force maléfique et brûlante durant l'instant d'une seconde, mais dès lors, ses yeux semblaient s'embraser d'une chaleur suffocante et continue. Il se jeta hors de l'étreinte de l'arbre en un saut acrobatique et s'enfonça dans les chemins sineux qui menaient à la plaine ouverte tout en espèrant qu'Éria le suiverait, malgré toutes les escarmouches rencontrées.
Une fois à proximité de son sanctuaire, Nathaniel apperçu un regroupement d'hommes encapuchonnés vêtus de longues toges noires en pleine cérémonie. L'expression passiblement haletante de Nathaniel se changea rapidement en une expression d'incompréhension qui fracassa le givre formé sur ses traits. Il agrippa son arc osseux et enfilla une flèce entre les joncs de mariage de sa femme et lui enfillés sur l'os de sa poigne.
Nathaniel était confut, car il ne comprenait guère la présence de ces hommes à cet endroit, mais une rage grandissait en lui comme il se remémorait qu'ils trahissaient la paix d'âme de son unique. Avant de relâcher la détente de son arc, ses yeux brûlants remarquèrent un vague brouillard tourbillonnant autour du cercle d'homme en plein rituel. Il laissa sa flèche voler en direction de la trachée d'un des encapuchonnés, mais elle heurta, contre toute attente, le brouillard qui s'illumina l'espace d'un moment. Une centaine d'âmes d'hommes et de femmes torturées fut révélée durant ce court moment; Nathaniel grimaça à l'idée qu'il avait lui même participé à l'ignorance commune d'un cimetierre dans cette région, ayant transporté chacune des pierres tombales à quelques centaines de lieues en guise de péllerinage envers sa défunte femme.
Il tenta encocha une autre flèce en un unique mouvement lorsqu'un main décrépite enchevêtra sa jambe gauche.
" Croyez-moi, je connais votre faim... " Souligna-t-il avec un ton compréhensif.
" Mais je ne suis guère comestible! " Hurla Nathaniel avec vivacité avant d'enfoncer les griffes de son gantelet entre les os de la paume de la main morte pour enfin séparer ses doigts jusqu'au poignet. Il un éclair, il retira son pied de l'emprise de la main et fracassa la main meurtrie de son tout son poids, posé derrière la force de son genou.
La main était mal en poitn et semblait inutilisable, mais tout autour de lui, comme il sse soulevait, des centaines de morts-vivants, se soulevaient à leur tour.

Éria ne savait pas les intentions de Nathaniel, mais elle le suivit, elle n'avait aucune raison de le craindre. Elle ne comprit pas la rage de Nathaniel contre les hommes et fut extremement surprit de voir des....des morts-vivants surgir du sol.

-"Mais qu'elle malédiction est enfouit dans ses terres!"

Éria crut d'abord a une piège de Nathaniel mais voyant qu'il avait lui même de la dificulter, elle effasa cette idée. Prenant son épée qui reposait dans son fourreau, elle frappa au hazard un mort, lui sectionnant le bras, l'homme continua d'avancer. Elle recula, ils étaient tout deux prit au piège.

-"Je ne sais pas si vous avez une solution, car sinon nous sommes dans un sacré pétrin."

Éria tenta de repousser un mort du bout de son épée, mais rien a faire, l'épée pénétra la chair sans la moindre douleur. Une main surgit de nul part lui saisi la jambe, la fesant basculer, elle perdit son épée au passage. Nathaniel tentait lui aussi de repousser un non-mort qui lui avait prit sa jambe.

-"Nathaniel!" Cria-t'elle.

Roth’gar fut quelque peu déçu de n’apprendre rien sur son compagnon Nathaniel. Le savoir qu’il recherchait plus que tout lui glissait des doigts. Cette réponse lui provoqua un peu de colère; sa vie était entièrement tournée vers le savoir. De plus, Nathaniel possédait de certaines connaissances qui le mèneraient vers la puissance. Les pensées du mage furent interrompues par le départ précipité de Nathaniel vers la sortie, Éria sur les talons. Roth’gar choisit de rester dans l’auberge pour le moment; son compagnon voulait avoir probablement un moment d’intimité avec Éria. Il en profita pour siroter son verre de cognac. Ses yeux se posèrent progressivement sur l’elfe Calissa. L’elfe semblait perdue dans ses pensées, les yeux dans le vague. L’émotion qui le saisissait depuis le début de leur rencontre fut plus forte. Afin d’échapper à ce sentiment, le mage déclara d’une voix claire en lui faisant un baise-main:
-Dame Calissa, veillez me pardonner, mais je dois partir. Cette rencontre fut un plaisir pour moi.
Roth’gar déposa sur la table une somme de pièces sonnantes et trébuchantes pour l’aubergiste. Ses pas le conduisirent à l’extérieur, plus précisément dans la direction prise par Nathaniel. Sur la plaine, il perdit totalement contenance; des centaines de morts-vivants attaquaient Éria et son compagnon. Il voyait encore une fois la connaissance qui était à sa portée disparaître sous les flots des morts.
-Cette source de savoir ne m’échappera pas une seconde fois, hurla Roth’gar en retroussant ses manches.
Le mage ferma les yeux et commença à psalmodier...

Malgré la lenteur déconcertante de ses opposants contre son agilité aiguisée, sa vitesse ne lui était d'aucune aide; Une feinte par-ci, une feinte par-là, ils ne réagissaient même pas. D'autres morts apparaissaient autour d'eux, leur nombre était exponentiel.
En une parade singulière d'offensives rapprochées à l'aide de son gantelet, Nathaniel évitait que les flots décrépits ne l'envahissent, mais bientôt, il baignerait dans une marre de chair qui l'assaillerait éternellement.
Dans la détresse d'Éria, Nathaniel prit une initiative en laissant aller sa créativité quasi infinie dans la soif du combat et fonça à tout vitesse vers la victime potentielle. Dans sa course, il se jeta devant Éria tout en la regardant, un sourire moqueur aux lèvres, et replongea derrière elle; en un moment il avait fait un tour complet autour d'Éria et avait relâché sa cape éternellement longue en suspend par-dessus et autour d'elle. La cape semblait immobile dans l'air quand Nathaniel fit un saut prodigeux sur l'épaule d'un mort pour sauter encore un fois à environ trente mètres de hauteur au-dessus d'Éria; durant l'espace d'une seconde, des ailes rouges membrannées aux allures déchues avaient ornées son dos et lui l'avaient poussé haut dans le ciel. Encore en faible ascension vu sa propulsion, Nathaniel, les yeux suffocant de flammes plus qu'intenses, dégaina son arc, enfila trois flèches et, comme il commençait à perdre de l'altitude peu à peu, il prononça quelques mots sous son souffle:
" Pour toi, mon amour... "
Dès lors, les flammes de ses yeux semblèrent partager la même férocité que la pointe de ses flèches désormais enflammées.
Une grondement vif parcourra le ciel noir comme ses flèches parcourraient la distance entre leur origine et le sol. Deux morts-vivants succombèrent sous la force des flèches enflammées, ayant été atteint directement. Éria était toujours totalement recouverte par la cape de Nathaniel à cet instant. Dès le contact des flèches au sol, trois nova de flammes s'étendèrent à une modeste distance, embrasant quelques morts-vivants, ralentissant davantage leur progression.
La seconde d'après, Nathaniel attéri au flanc d'Éria et replaça sa cape innerte sur ses épaules, rangea son arc et se positionna à nouveau en position défensive. Quelque chose tracassait Nathaniel, il avait aperçu Roth'gar, au loin; sans doute l'avait-il vu aussi haut dans le ciel...

Les paroles de son sortilège franchissaient ses lèvres à une vitesse incroyable. Ayant presque terminé, Roth’gar ouvrit les yeux. Les mots restant ne furent jamais dits; les yeux du mage étaient fixés sur la silhouette de Nathaniel qui avait fait un bond prodigieux dans les airs. Une lumière étrange rouge apparut dans son dos et disparut dans la seconde. Roth’gar perdit totalement le fil de la bataille; ses pensées étaient entièrement tournées vers son compagnon. Il cherchait désespérément une raison à ce phénomène.
Un cri déchira le voile de son esprit, interrompant le cours de ses pensées. Roth’gar reconnut immédiatement Calissa; seule cette elfe possédait une voix mélodieuse. Il se retourna rapidement. Ce qu’il vit le laissa d’effroi; Calissa, le seul être qui avait créé un sentiment agréable dans son coeur, gisait sur le sol et un mort-vivant la menaçait avec ses griffes.
-Non! Hurla Roth’gar en écartant ses mains.
Dès l’instant où son hurlement franchit ses lèvres, il psalmodia une incantation. Une aura glacée apparut autour de lui. Son pouvoir meurtrier allait se déclencher. Une sphère de glace se forma dans sa main et la quitta. Elle fracassa violemment le mort-vivant qui se désintégra. Sa soif de colère n’étant pas étanchée, Roth’gar se retourna dans la direction de Nathaniel, d’Éria et de l’armée des morts-vivants.
-Vous allez le payer! Cria-t-il.
L’incantation qu’il avait interrompue remplit sa bouche. Terminée en quelques secondes, des dizaines de projectiles glacés furent projetés en direction de la plaine...

Le cri féminin attira assez l'attention de Nathaniel pour qu'il se tourne dans la direction de sa provenance; il y avait vu Roth'gar, mais maintenant, il savait que Calissa était là, vers le sud-est, elle aussi. Soudain, un éclat bleuté envahit son regard et s'éteignit au moment même où un vent froid vint contredire celui projetté par le rituel derrière lui.
" Roth'gar, protège Calissa... " Soupria Nathaniel comme en prière.
Il se retourna prestement vers Éria, l'aida à se lever et ajouta:
" Il faut que tu atteignes Roth'gar et Calissa, à une quarantaine de rangs de morts vers le sud-est. Plus nombreux vous serez, meilleures seront vos chances de survivre. "
Autour de lui, les morts vivants au front étaient rongés par les flammes et tombaient doucement en lambeaux.
Avant de plonger encore une fois dans la mer morte, Nathaniel jeta un autre regard haineux à la machination nécromante devant lui.
Tête première, griffes devant, les rangs des morts s'écartaient peu à peu, mais Nathaniel était déjà blessé à son bras droit, blessure infligée par Éria, et à maintes autre endroits.

Le sort du mage fut puissant; des dizaines de créatures d’outre-tombe tombèrent sous le choc. Roth’gar en fut satisfait, sa haine étant quelque peu étanchée. Son regard se porte sur Éria et Nathaniel. Les deux tenaient le coup face aux créatures. Soudain, Nathaniel se tourna vers les morts et chargea, laissant un sillage de sang derrière lui. Cet être est vraiment fantastique, pensa le mage. Une fois sa colère disparue, il repensa à Calissa. D’un bond, il parcourut la distance qui les séparait et s’agenouilla près d’elle. Son état était lamentable et elle semblait sur le point de perdre connaissance. Sachant que le prochain sortilège allait lui prendre toute son énergie, Roth’gar s’exécuta tout de même. Une lumière blanche quitta ses paumes et soigna la blessure à sa tête. Totalement vidé, le mage s’étendit sur le sol pour récupérer.

Au sein des rangs exigus des morts, la cape de Nathaniel semblait se prolonger disproportionnellement comme le rouge fluant de sa cape laissait derrière lui du sang caillé et purtide en abondance. Ses yeux rugissaient intensément d'une lumière vive continue comme il déchirait la chair morte de ses opposants. Une main griffu tenta de l'agripper au visage, mais Nathaniel fut plus rapide; il saisit le poignet de son adversaire et en un saut vif, se souleva plus haut que le bras du mort pour retomber, genou premier, sur le coude du mort qui se sépara immédiatement du corps sous le choc. Le bras innanimé en main, Nathaniel enfilla la main pourvue de griffes sur sa main biologique comme un gant pour être armé des deux mains. Pourtant, son adversaire n'était pas encore innoffensif. En un tour de main, Nathaniel enfonça ses griffes dans les orifices oculairs du décédé, paume vers le ciel, et sauta encore un fois; ses doigts toujours enfoncés dans le crâne du mort vivant, Nathaniel se tenait en "chandelle" sur sa tête. Sa gorge s'ouvrit et laissa fluer une modeste quantité de sang caillé sur son torse avant que sa tête s'enfonce complètement entre ses épaules et brise sa colone vertébrale. En atterissant derrière le premier mort, Nathaniel effectua un tour sur lui-même, ses griffes entaillant sévèrement les ennemis les plus rapprochés; comme il tournait, ses yeux laissaient derrière eux un scillon de lumière comme lorsqu'on agite un tison dans la nuit.
Nathaniel, quant à lui, était toujours loin du lieu de rituel l'origine de ce chaos, trop loin.